Fatigué du Veto Russe en Ukraine, l’idée de réformer l’ONU séduit à nouveau Washington

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La réforme de l’ONU et de son Conseil de sécurité est un serpent de mer qui ressurgit à l’approche de chaque Assemblée générale des Nations unies. Mais ces appels sont aujourd’hui relayés par un allié des plus improbables: les Etats-Unis, exaspérés par l’utilisation par Moscou de son veto, en pleine guerre ukrainienne.

Pour s’assurer que la Russie ne bloque pas les réunions du Conseil de sécurité, les puissances occidentales se sont appuyées sur une série de règles de procédure. Pour condamner la Russie, elles se sont tournées vers l’Assemblée générale de l’ONU, où chacun des 193 Etats membres dispose d’une voix.

Mais l’impuissance de l’ONU dans ce conflit est notable, et il suffit pour cela de remonter au soir du 23 février 2022: quand au beau milieu d’une réunion du Conseil de sécurité, Vladimir Poutine a annoncé au monde entier qu’il lançait une “opération militaire spéciale” en Ukraine. Et que depuis New York, des diplomates continuaient à lire des déclarations pré-écrites.

“Statu quo intenable” 

Dans un discours récent, l’ambassadrice américaine à

Réunion du Conseil de sécurité – Vote internationales de Maintien de la paix et de la sécurité 

l’ONU Linda Thomas-Greenfield s’est montrée en faveur de “propositions sensibles et crédibles” pour élargir et donc réformer le Conseil de sécurité, qui compte aujourd’hui 5 membres permanents (Etats-Unis, Russie, Chine, Royaume-Uni et France) et 10 non-permanents.

“Nous ne devons pas défendre un statu quo intenable et dépassé”, a-t-elle plaidé. “Mais plutôt faire preuve de flexibilité et d’ouverture, au nom d’une plus grande crédibilité et légitimité”, a affirmé l’ambassadrice. “Tout membre permanent qui use de son droit de veto pour défendre ses propres actions perd toute autorité morale et doit être tenu pour responsable”, a-t-elle aussi averti. Ce type de propos font sourire Pékin et Moscou, qui renvoient à l’époque de Bush fils, quand les Etats-Unis n’avaient pas hésité à contourner le Conseil de sécurité pour envahir l’Irak.

Pour Naledi Pandor, la ministre des Affaires étrangères d’Afrique du Sud — un pays qui brigue depuis longtemps un siège au Conseil de sécurité — il est hypocrite de critiquer le concept du veto seulement à cause de l’usage qu’en fait la Russie aujourd’hui. “Certains d’entre nous ont depuis longtemps appelé à ce que l’Assemblée générale puisse jouer un plus grand rôle, sans jamais avoir été soutenus. Mais tout à coup, aujourd’hui, oui ?”, a-t-elle récemment lancé devant un think tank à Washington. “C’est là que le droit international commence à ne plus vouloir rien dire.”

Linda Thomas-Greenfield a reconnu que les Etats-Unis n’étaient pas toujours les premiers à respecter leurs propres principes, mais a souligné que depuis 2009, Washington n’avait utilisé son veto que quatre fois, contre 26 fois pour la Russie.

Pour Richard Gowan, analyste à l’International Crisis Group, les inquiétudes des Etats-Unis autour des “dysfonctionnements” du Conseil du sécurité sont sincères. “Mais c’est aussi une façon habile de pointer du doigt la Chine et la Russie. Parce que nous savons tous que la Russie et la Chine sont les pays les plus réticents à une réforme du Conseil”, argue-t-il.

La plus forte impulsion en faveur d’une réforme du Conseil de sécurité remonte au 60ème anniversaire de la fin de la Seconde Guerre mondiale, quand le Brésil, l’Allemagne, l’Inde et le Japon avaient conjointement déposé leurs candidatures à un siège permanent. La Chine s’était alors farouchement opposée à l’attribution d’un siège à une autre puissance d’Asie de l’Est.

Essouflement ? 

Les velléités japonaises ont longtemps été soutenues par Washington. Lors d’une visite en Inde, l’ancien président Barack Obama avait exprimé son soutien général à une candidature de New Delhi. Mais passé le voeu pieux, très peu d’initiatives ont jusqu’ici été lancées pour que ces candidatures aboutissent.

Selon Richard Gowan, un appel clair de Joe Biden en faveur d’une refonte du Conseil relancerait instantanément les efforts de réforme. Mais, tempère-t-il, “mon sentiment est que les Américains n’ont pas nécessairement de but précis dans leur démarche”. “Ils font cela pour tâter le terrain, pour défier les Chinois et les Russes. Cela pourrait s’essouffler”, prévient-il.

Les spécialistes de la diplomatie doutent aussi qu’une réforme du Conseil de sécurité puisse avoir lieu tant que la Russie et la Chine verront leurs intérêts menacés. “Parmi ceux qui soutiennent l’Ukraine contre l’agression russe, c’est un sujet récurrent”, fait remarquer John Herbst, un ancien diplomate américain aujourd’hui au Atlantic Council. “Mais je pense que les chances que cela aboutisse sont très, très faibles.” affirme t-il.

Avec la Russie dans le collimateur, l’idée de réformer l’ONU séduit à nouveau Washington

Dans ses remarques à la 77ieme session de l’Assemblée générale des Nations Unies cette année, le président Biden a adopté des positions ouvertes et favorables a de profonds changements au Conseil de sécurité de l’ONU. Il a dit ceci :

“Je crois aussi que le moment est venu pour cette institution de devenir plus inclusive afin de mieux répondre aux besoins du monde d’aujourd’hui.

Les membres du Conseil de sécurité de l’ONU, y compris les États-Unis, devraient constamment défendre et protéger la Charte des Nations Unies et s’abstenir d’utiliser le veto, sauf dans des situations rares et extraordinaires, pour s’assurer que le Conseil reste crédible et efficace.

C’est aussi la raison pour laquelle les États-Unis sont favorables à l’augmentation du nombre de représentants permanents et non permanents du Conseil.  Cela inclut des sièges permanents pour les pays que nous soutenons depuis longtemps et des sièges permanents pour les pays d’Afrique, d’Amérique latine et des Caraïbes.

Les États-Unis sont attachés à ce travail vital.”

Une reforme de l’ONU est-elle la fin de l’hégémonie Américaine? 

C’est une politique qui créera toutes sortes de problèmes et sapera les intérêts américains. L’élargissement du Conseil est envisagé depuis des décennies. Pourquoi alors n’a-t-il jamais été atteint ? Parce qu’aucune formule d’expansion n’a été acceptable. L’Italie se battrait contre l’ajout de l’Allemagne; Le Pakistan se battrait contre l’ajout de l’Inde; L’Argentine se battrait contre l’ajout du Brésil; Le Nigéria aurait du mal avec l’Afrique du Sud; La Chine rejetterait l’ajout du Japon; et ces cinq pays sont les nouveaux ajouts les plus logiques compte tenu de leur taille et de leur influence mondiale. Le président veut-il vraiment qu’un pays des Caraïbes soit ajouté en tant que membre permanent du Conseil, comme ses remarques le suggèrent? Pourquoi?

L’ajout de membres fera également ressembler davantage le Conseil à l’Assemblée générale. Est-ce que cela est censé le rendre plus efficace et efficient?

Le veto est un outil essentiel d’autodéfense pour les États-Unis à l’ONU et pour la défense des alliés des États-Unis. Le président dit que nous devrions « nous abstenir d’utiliser le veto, sauf dans des situations rares et extraordinaires ». Entre 1973 et 2021, les U.S.A ont utilisés le veto 53 fois pour protéger Israël contre des résolutions soient disant “injustes, déséquilibrées et hostiles”. Toutes ces situations sont-elles « rares » et « extraordinaires » – ou sont-elles normales pour le cours à l’ONU ? Et comment le fait de permettre l’adoption de mauvaises résolutions qui sapent les intérêts américains rend-il le Conseil « crédible et efficace » ?

le président Américain Joe Biden à la 77ieme session de l’Assemblée générale des Nations Unies (21-26 sept 2022)


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